De l'invariable
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Chapitre troisième
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De la matière incorporelle. |
Il te faut savoir que ces quatre éléments sont composés d'une même matière. Cette matière est linéaire. Elle n'est pas corporelle ; car ces lignes, dont elle est faite, ne possèdent qu'une seule dimension. Ces lignes doivent s'associer pour créer des éléments dans l'ordre de l'étendue et du corporel. Tu vas apprendre maintenant comment elles s'unissent selon qu'elles composent l'un des quatre éléments. |
De la terre et de l'eau. |
Lorsqu'elles constituent la terre, comme tous les corps solides, ces lignes s'associent en des formes géométriques. Ces formes s'imbriquent alors les unes dans les autres et donnent des substances compactes. Pour l'eau, comme pour tous les corps liquides, elles s'articulent en des formes courbes et souples, ce qui fait que ces dernières ne peuvent se tenir solidement entre elles et que la moindre force les meut ; sinon elles tendent à se répandre et à couler. |
Remarque sur l'organisation des formes. |
Tout ceci est à l'image des lignes qui forment l'écriture. La terre, comme les lettres associées des mots et des propositions, forme des groupes compacts. Alors que l'eau est semblable à des lettres éparses que rien ne relierait entre elles. |
De l'air. |
Pareillement à l'eau, pour l'air et pour tous les corps gazeux, ces lignes construisent des formes souples et courbes. Mais elles n'ont plus alors de tracé défini. Elles ne sont plus comme des lettres, mais comme des formes arbitraires avec lesquelles un artiste construit un dessin. C'est parce que ces formes sont soumises à mutation que les gaz qu'elles composent ont une telle élasticité qu'aucun autre élément ne possède. |
Du feu. |
Quant à l'élément igné, il est composé de lignes pures, quelquefois droites, quelquefois recourbées, qui rayonnent en tous sens, bien qu'elles aient tendance à s'élever ce qui est vrai particulièrement pour le feu que nous connaissons dans les régions de la surface de la terre. |
De la nature ignée et de sa vertu régénératrice. |
Ces lignes sont tranchantes et acérées ; c'est pourquoi le feu est corrupteur pour tous les autres éléments. Il défait ainsi les figures des solides jusqu'à ce qu'ils se liquéfient, et de même il rend les liquides volatils, et enfin le volatil igné. |
Remarque sur la nature corruptrice du feu. |
Les premiers docteurs qui découvrirent ces vertus ignées s'en inquiétèrent. Ils crurent y déceler un processus de corruption qu'aucune génération n'était de nature à contrebalancer. Ils enseignaient que le monde avait été crée une fois pour toute au début des temps, et que depuis il se défaisait. |