IX LA PORTABILITÉ ET LE VÉRITABLE TEXTE
La numérisation optimale
Un texte peut épouser des quantités de formes tout en restant le même texte. Cela peut aller dun enregistrement sonore à une suite de code binaire. Et naturellement, la conversion est toujours possible. On peut alors se demander avec raison quelle est la forme optimale que peut épouser un texte.
Une forme optimale serait celle qui offrirait la meilleure lisibilité, la meilleure portabilité, avec une quantité quasi nulle de modification et une quantité minimale dinformations nécessaires.
Les critères dépendent en grande partie du texte. La version ASCII serait la meilleure pour un texte ne possédant ni enrichissement, ni illustration, et nayant aucune exigence particulière de mise en page, comme cest le cas généralement dune simple correspondance.
Sinon le recours au html est le plus adapté. Le problème est quil existe divers html, englobant plus ou moins xml, css et divers scripts.
Le html peut bien ne pas être propriétaire, il nen demande pas moins un dispositif logiciel pour linterpréter, quand bien même celui-ci serait librement accessible. En principe, tout texte enregistré en html est lisible par un navigateur, certains traitements de texte, et les éditeurs html « wysiwyg ». En pratique, cest plus compliqué :
Certains navigateurs utilisent des codes qui leur sont spécifiques et ont des façons particulières de lire certaines balises. Il est clair aussi que la spécification du code obéit à des stratégies de contrôle du réseau par des entreprises commerciales. Lintelligence humaine étant bornée, la plupart des utilisateurs emploient le navigateur pré-installé sur leur machine. La plupart des concepteurs de pages html abandonnent à leur logiciel lécriture du code et ne se soucient pas de le corriger.
Sil existe pour tous les systèmes de corrects ou dexcellents outils pour traiter le texte, il est difficile de les connaître. Et sil est tout à fait possible daller et venir de tout format propriétaire ou opaque au html et à limpression tout en maintenant la mise en page et la typographie, cela relève quand même de lart accompli, et demande de longues années dapprentissage et de tâtonnements toujours recommencés.
Comment y parvenir ?
Si lon jette un coup dil sur lapparition de limprimerie et lémergence des langues vernaculaires en langues littéraires, on voit bien que la fixation de lorthographe, de la grammaire et de la typographie ne sest pas faite sans mal et en un jour ; et lon voit même quune certaine forme de combat na jamais cessé depuis. Cest en partie le même combat qui se poursuit, et cen est en partie un nouveau.
On peut déjà conclure de cette remarque quil sagit de se placer dans la durée, et non de se contenter décrire un code parfait pour telle version de tel navigateur qui durera ce que durent les roses.
On retiendra dabord deux principes : (i) il existe plusieurs versions de html strict que tous les navigateurs savent interpréter. On aura donc intérêt à sy tenir. (ii) Si les nouveaux navigateurs savent interpréter les anciennes versions, linverse nest pas vrai. Il est donc judicieux de ne pas utiliser une version plus récente que celle qui est nécessaire à son projet.
On peut aussi avancer le troisième principe que, tôt ou tard, de nouveaux navigateurs ne sauront plus interpréter un ancien code, ce qui invalide le second principe, et incite à opter pour la plus récente version du html.
Noublions pas quavant le numérique il était nécessaire de recomposer entièrement un texte pour le rééditer. Dans les pires conditions, les nouvelles techniques nexigeront jamais un tel travail. À lhorizon de celles-ci, on doit attendre quelles nen exigent aucun.
Il est dans la nature du numérique quun texte puisse naviguer entre des supports, des systèmes et des applications sans subir daltération.
La portabilité
Ces questions techniques de copie de sauvegarde (voire ces questions juridiques) en laissent ouverte une autre, celle de ce quest un texte, de ce quest, si lon peut dire « le véritable texte » : un manuscrit, des feuillets imprimés, un fichier numérique, et quelle sorte de fichier ?
Jai tenté de montrer que le texte est un objet logique, et quen tant que tel, il ne peut exister que sous la forme dobjet matériel, quen tant quil est gravé dans un matériau.
En un sens, cette gravure est contingente, puis quil est inhérent à la définition du texte en tant quobjet logique den être détachable. En un autre sens, elle ne lest pas, puisquil nest pas moins inhérent à sa nature que cette inscription soit faite de telle sorte quelle permette sa portabilité sans altération, cest-à-dire, dabord, sa réinscription à lidentique sur un autre support.
Éditabilité et portabilité
Cette seule reproduction à lidentique lui demeurerait cependant contingente si elle devait lui faire perdre son éditabilité. Quand un auteur fait une copie de sauvegarde, cest bien sûr dans le but de pouvoir la modifier.
Ici les définitions juridiques de la GNU FDL se révèlent insuffisantes et confuses. Nous avons plutôt trois sortes de copies : la copie propriétaire, la copie en lecture seule et la copie éditable, qui en réalité en sont quatre :
Propriétaire : éditable lecture seule
Libre : éditable lecture seule
Ce que nous pouvons appeler alors « le véritable texte » est le texte numérisé dans un format librement éditable, dans la mesure, toutefois, où ce format nentraîne aucune altération.
Pour le poème de Pierre Garnier, Cosmos, le simple texte brut, du moment quil reste dans une police à chasse fixe, possède toutes les informations qui constituent « le véritable texte » : les lettres et les espaces. Dans de nombreux cas, un langage plus élaboré est nécessaire, comme le html.
Les outils pour une parfaite portabilité sont encore à concevoir.
La Version 01 française de
Qu'est-ce qu'un texte ? est constitué
de 16 fichiet html associés à une feuille de style (text1.css)
et d'un dossier "graphics" contenant 15 fichiers,
réunis dans un fchier
txt_fr, que l'on peut librement télécharger.
© Jean-Pierre Depétris, avril 2002, avril 2003
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