Propriété intellectuelle et droit d'auteur sont devenus en ce début de siècle des enjeux qui dépassent largement les auteurs et les intellectuels au point de ne paraître même plus les concerner. Politiques et législateurs abordent pourtant ces questions par ce qu'on ne peut qu'appeler le petit bout de la lorgnette : le téléchargement de musique sur le net, principalement, et les pertes qu'il pourrait entraîner dans l'industrie du disque.
De l'autre côté, des idées d'une tout autre envergure sont venues apporter des solutions originales pour réconcilier l'esprit des lois d'une autre époque avec des techniques et des œuvres nouvelles. Ce sont celles de copyleft et de Source Libre, qui ont été conçues spécifiquement pour des logiciels, et dont la tentation est forte d'en étendre les principes à toute forme de travail intellectuel.
Le droit d'auteur a été en Occident historiquement conçu pour le livre et autour de lui. Ce sont plutôt aujourd'hui deux conceptions rivales qui s'affrontent. L'une veut ramener le droit d'auteur autour d'une production industrielle de loisirs de masse ; l'autre, autour de la programmation de logiciels. On peut pourtant légitimement se demander s'il est seulement dans la nature du droit d'auteur de s'appliquer à de telles productions. On n'y est parvenu qu'en forçant quelques analogies avec le livre.
Apparemment, les concepts classiques du droit ne s'appliquent plus à la nouvelle situation. Même les nombreux travaux de sociologie des Nouvelles Technologies de la Communication ne paraissent plus saisir les mutations en jeu. On peut donc en conclure que les paradigmes de la sociologie sont devenus aussi obsolètes que ceux du droit. C'est pourquoi la question semble mal engagée sur ce terrain juridique, politique, sociologique et commercial. Elle repose manifestement sur de nouveaux paradigmes qu'il serait utile de dégager.
C'est ce que je vais tenter de faire, en commençant par éprouver quelques concepts bien poussiéreux, et observer comment ils fonctionnent.
Les concepts d'œuvre de l'esprit et de support matériel ont perdu toute pertinence avec le numérique, l'ordinateur personnel et l'internet.
Une conception assez grossière de la matière pourrait comprendre ce que serait un support matériel en l'identifiant à ce qui se mesure en poids. Pour autant, tout ne se vend pas au kilo, mais aussi au mètre, au litre, etc. Voilà donc ce que voudrait dire « matériel » : ce qui peut donner lieu à une mesure quantitative.
Pourtant, cette partition constitutive entre œuvres de l'esprit et supports matériels a été tout particulièrement employé à propos de spectacles publics, notamment du théâtre. Le spectacle ne se vend ni au kilo, ni au litre, ni au mètre. Le spectacle a un coût, et un certain nombre de spectateurs payants. Le quantitatif peut donc s'entendre assez largement.
Les œuvres de l'esprit, elles, ne sont pas quantifiables, et leur rémunération n'est concevable qu'à partir du moment où elles sont incorporées à des « supports matériels » qui, eux seuls, le sont. L'auteur est donc payé en fonction d'un pourcentage de leur valeur ― à la commission, pourrait-on dire.
Pourtant, la mesure quantitative a paru ce dernier siècle ne devoir reculer devant rien : logon, octet, bit… Serait-ce des mesures de l'immatériel ? Ou bien l'information serait-elle devenue matérielle ? Mesurerait-on maintenant l'esprit au kilo (kilobit) ?
Réfléchissons un peu : un même texte peut être numérisé en des fichiers de poids très distincts. Aurait-on alors à faire à deux œuvres de l'esprit distinctes ? Dans ce cas, convertissons un fichier .xml en .pdf, un fichier .gif en .jpg, un fichier .aif en .mp3, et nous pourrons copier une œuvre entièrement nouvelle qui ne devra rien à celle d'origine. Il n'y aura pas plus de copie que de plagiat.
Non ? Alors en quoi la suite de bits serait-elle « immatérielle » ?
Et en quoi aussi bien un concert serait « matériel » ?
Ou en quoi ce serait l'inverse ?
Certes, le web n'est pas que des données. Il y a des machines et des tuyaux, des satellites, des centres de dégroupages… et beaucoup de gens qui y travaillent. Ne serait-ce pas plutôt de ce côté que serait à chercher le support matériel ?
Entre les deux, il y aurait des producteurs (de bien immatériels) et des consommateurs. À partir de quand passerait-on de l'un à l'autre ? De toute évidence, on devient producteur à partir du moment où l'on dépose le moindre bit en libre accès sur le web.
Logiquement, si l'on s'en tient à l'esprit de la loi, tous ceux qui déposent ainsi des informations sur la toile, la produisent. Ils devraient donc être rémunérés au pourcentage de tout ce qui en constitue le support matériel, et qui est donc payé par les usagers ― c'est-à-dire, ceux qui se contentent d'y naviguer.
Ce serait logique, mais comment répartir, et à l'échelle mondiale ? Comment seulement mesurer ? Au kilooctet ? Ou au temps passé sur un site ou un serveur FTP ? Au kilobit-heure ? Et comment prélever et harmoniser pour le monde entier ?
De toute façon, tous les producteurs de l'internet sont aussi des consommateurs, et si tous les consommateurs ne sont pas producteurs, on peut supposer qu'ils le deviendraient vite s'ils y trouvaient le plus léger avantage, ne serait-ce qu'une petite baisse de leur abonnement.
Apparemment, les politiques et les juristes voudraient ramener le droit d'auteur à la seule rémunération. Ils voudraient faire dépendre la rémunération d'un auteur de son affiliation à une société de recouvrement de ses droits. Cela revient en somme à faire dépendre le statut d'auteur d'une telle affiliation, et celle-ci d'une rémunération ― et donc à remettre en cause le droit d'auteur.
Dans son principe, le droit d'auteur n'est en rien un droit à la rémunération. Le droit d'auteur, en effet, dans son sens strict, s'applique à toute personne ayant réalisé une œuvre de l'esprit, et rien de plus. Il s'applique, plus précisément, dès qu'une œuvre est rendue publique, avec ou sans l'accord de son auteur. C'est en vertu de quoi celui-ci peut se retourner contre ceux qui se passeraient de cet accord, et c'est surtout en vertu de quoi il peut négocier une rémunération pour cet accord.
Il est à noter qu'on remet en cause le droit d'auteur en même temps que son pendant, celui à la confidentialité. On met ainsi en relief l'intime complémentarité de ces deux droits.
Le web ne remet-il pas en cause la vielle distinction fondamentale entre public et privé ? Le web n'est pas la télévision, où quelqu'un « parle dans le poste » en principe pour tout le monde ; ni le téléphone, où quelqu'un s'adresse à un correspondant, en principe en toute confidentialité. Le web occupe plutôt l'espace intermédiaire entre ces deux extrêmes.
La façon dont on se focalise sur la musique et la vidéo sur le net est le meilleur moyen d'éluder la question. Les industries du disque et du cinéma n'ont en réalité que peu de rapport avec le net, et il est peu probable qu'elles soient réellement menacées par le piratage. Elles seraient plutôt menacées d'obsolescence, en tant que médias de masse, et il n'y a peut-être pas de bonne raison pour les défendre.
Le net n'est à l'évidence pas fait pour les industries du disque et du cinéma, qui sont des médias de masse, alors qu'il ne l'est pas. C'est en cela qu'il les menace, et, en retour, qu'il en est menacé.
Ce n'est pas en ce qu'il serait un moyen d'échange gratuit de copies qu'il menacerait la consommation de produits industriels. C'est en ce qu'il n'est pas un moyen de consommation.
L'internet et l'ordinateur personnel sont des moyens de production. Irrésistiblement, ils invitent à créer et échanger, pas à consommer.
Aussi est-il vain de tenter de les transformer de force en moyen de consommation et en médiat de masse. Ce qui revient à faire payer par ceux qui créent, des produits qu'ils ne veulent pas consommer.
On peut toujours utiliser le net pour établir une relation privée et confidentielle, ou s'adresser à travers lui au monde entier. Pour autant, ce n'est pas là l'usage auquel il est destiné, ni seulement adapté. Le net est destiné et adapté, comme son nom l'indique, à la communication en réseaux, plus ou moins ouverts, plus ou moins fermés.
Il est évident que plus chacun a le moyen virtuel de s'adresser à tout le monde, plus les chances réelles s'amenuisent pour que chacun soit entendu de tous.
Il est clair, dans ces conditions, que la distinction entre « copie privée » et « diffusion publique » devient toujours plus ambiguë.
Les concepts de public et de privé sont devenus peu pertinents dans leur radicale opposition. Celui de transparence l'est davantage, dans son opposition à opacité.
Ce qui est public n'a pas à être transparent en soi ― on n'a pas besoin de voir derrière le décor d'un théâtre ―, ni davantage à être visible derrière une surface transparente. Ce qui est privé, personnel, confidentiel, voire secret, n'a pas davantage besoin d'être opaque.
Le rapport entre transparent et opaque est tout aussi relatif qu'est absolu celui entre public et privé : il est probable qu'une accumulation de couches transparentes aboutisse à une opacité. Ce que l'idée de transparence ajoute à celle de visibilité, ce n'est pas seulement la relativité, c'est celle de profondeur ― celle de champ et de degré.
Le mot « public » est un concept-clé de la civilisation et des institutions modernes. Selon qu'il est employé comme adjectif ou comme substantif, il prend deux sens distincts. L'adjectif désigne ce qui appartient en commun à tous les citoyens : biens publics, services publics, enseignement public, espace public, santé publique… chose publique (res publica : république). C'est un concept politique.
Le substantif désigne simplement des spectateurs ; par extension, des consommateurs, des auditeurs, des clients, une assistance… c'est-à-dire un groupe essentiellement passif : on séduit un public, on l'attire, on le captive, littéralement, on le rend captif.
C'est une observation grammaticale : l'adjectif et le substantif sont employés dans des acceptions totalement contradictoires et irréconciliables. Si l'adjectif implique une communauté active, qui produit la chose publique et la dirige démocratiquement, au point que le concept de démocratie y prend tout son sens, le substantif désigne, lui, une communauté passive.
L'informatique donne au concept de transparence une acception précise et technique. La transparence renvoie au code source. La transparence s'oppose alors à quelque chose de tout à fait précis : le wisiwig (abréviation de l'anglais what I see is what I get : je vois ce que j'obtiens). Cette opposition suppose la possibilité de passer d'un terme à l'autre, et non qu'ils s'excluent. Dans la pratique, je peux à tout moment souhaiter afficher le code ou le masquer pour voir ce que j'obtiens.
Pourquoi a-t-on besoin d'afficher du code, et donc d'avoir un système transparent ? Parce qu'on le travaille, évidemment. Si l'on n'a rien d'autre à faire d'un texte que le lire, d'un plan ou d'une image, que les regarder, d'un son que l'écouter, etc, ou même les copier, qu'a-t-on besoin de code, et donc de transparence ?
On n'a pas davantage besoin de wisiwig. On n'a pas besoin de voir ce qu'on obtient, puisque l'on n'obtient proprement rien, attendu qu'on ne fait rien.
Déjà, dans la simple utilisation basique d'un traitement de texte, a-t-on besoin d'afficher les caractères invisibles si l'on ne fait que lire ?
L'écriture n'a pas été inventée pour être lue. C'est une évidence dérobée, mais une évidence quand même. L'écriture a d'abord servi à être interprétée, exécutée.
Aussi, la pratique de l'écriture et de la lecture fut-elle au cours des siècles réservée à de petits groupes de lettrés. Seul le musicien a besoin d'une partition, pas l'auditeur, l'acteur a besoin d'un texte, le prêtre, le juge… Au public, les oreilles et les yeux suffisent.
Il y a très peu de temps que l'écriture et la lecture sont devenues des pratiques populaires. On n'apprend pas à écrire sans apprendre à lire, et inversement. C'est encore une évidence dérobée.
Il est à noter que la généralisation de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture en Europe est postérieure aux premiers balbutiements de l'informatique. La machine de Babbage date de 1834 et l'école publique en France des années 1880.
On a entretenu l'illusion, et on l'entretient toujours, qu'il serait possible de former des masses à la lecture sans en faire ipso facto, au moins virtuellement, des auteurs. (Il est évident alors que masse et auteur sont des termes contradictoires.)
L'auteur n'est pas apparu avec l'écriture. Les premiers écrits n'en ont pas. Ils n'ont même pas des auteurs anonymes (autre contradiction dans les termes), ils n'en ont proprement pas. L'auteur des paroles, des actes, des découvertes… n'était pas l'auteur du texte. On ne concevait tout simplement pas qu'un texte ait un auteur : pour la simple raison qu'il n'était qu'une trace mnémonique, une inscription intermédiaire entre un acte et une réitération.
L'auteur d'un texte n'est apparu qu'avec la lecture, la lecture du texte : donc avec un lecteur. Pendant des siècles, ce lecteur ne pouvait être qu'un autre lettré. Il ne pouvait pas être « un public », puisque ce « public » ne savait pas lire.
Le droit d'auteur date encore de cette époque où « le public » était illettré. C'est ce qui fait son ambiguïté : Dans son principe, inspiré d'un idéal humaniste et universaliste, il se présente comme un droit applicable à tous les hommes. Dans les faits, il ne pouvait concerner qu'une petite caste de lettrés.
Le recul de l'illettrisme impose de lever l'ambiguïté. Ou le droit d'auteur est un droit de l'homme fondamental (tous les hommes naissent libres, égaux et auteurs), ou il devient celui d'une caste dont il définit le statut et la rémunération.
Il est assez évident que cette seconde éventualité ne saurait être qu'une tartufferie. En effet, le droit s'intéresse à l'auteur à partir du moment où son œuvre est rendue publique, c'est-à-dire publiée et diffusée, avec ou sans accord de l'auteur.
Certes, selon la loi, l'auteur est le légitime propriétaire de l'œuvre qui reste dans son tiroir, sans qu'il ait pour cela à la déclarer ni faire de quelconques démarches, mais le droit ne s'applique qu'à partir du moment où elle en sort. Dans ces conditions, si le droit d'auteur, plutôt qu'être un droit de l'homme, sert à définir un statut d'auteur, il devient de fait un droit de diffuseur, de publisher (même pas d'éditeur). Il devient de fait la restauration d'un droit féodal de diffusion.
En définitive, le droit d'auteur ne devient effectif que s'il est cédé à un tiers. C'est un droit dont l'auteur n'a rien d'autre à faire que le vendre. (Vente de droit : encore une contradiction dans les termes.)
Depuis que des auteurs existent, l'écriture et la lecture furent une même activité, qui ne concernait qu'une plus ou moins petite caste de lettrés. Aucun auteur ne trouvait des lecteurs qui ne fussent, d'une façon ou d'une autre, ses pairs, si ce n'est ses interlocuteurs.
On peut donc sérieusement se demander ce que signifierait cette extension d'une petite caste de lettrés à la population tout-entière. On pourrait redouter une telle éventualité. Adolphe Tiers a écrit à ce propos des discours édifiants. On pourrait la souhaiter. « La poésie sera faite par tous et pour tous » écrivait Lautréamont. On ne peut que difficilement entretenir l'illusion que l'éradication de l'illettrisme ne serait pas faire de chacun un lettré.
Que serait un état intermédiaire entre le lettré et l'illettré ? On élude la question en substituant aux deux termes celui d'auteur et celui de lecteur.
Celui qui n'écrit pas de texte, qui n'écrit pas de partition, d'équation, de code… va-t-il les lire ? Pourquoi le ferait-il ? Il lui suffit de contempler et d'écouter les représentations que lui offrent ceux qui les ont lus. Pourquoi ne se contenterait-il pas de productions audiovisuelles, de multimédia ?
Il n'est pas rare pourtant, après avoir vu un film, de lire le roman dont il est tiré. Écouter une musique peut donner envie de lire sa partition ; ou le texte d'un chant. En ouvrant une page web, on peut avoir envie d'en afficher le code. Tout cela peut arriver sans qu'on ait l'idée d'en faire quelque chose de précis, dans la seule intention, disons, de mieux comprendre.
Que cherchons-nous ainsi, en remontant vers la source ? Pourquoi le résultat (what I get) ne nous suffit-il pas ?
Doit-on être un lettré pour apprécier un son, une image, qui devrait nous toucher le plus intuitivement ? Ouvrir le capot et comprendre aiguiserait-il en définitive cette intuition immédiate ?
La notion d'œuvre de l'esprit renvoie implicitement à deux domaines dont les rapports sont ambigus : la recherche et le divertissement.
La recherche, cela recoupe la diffusion, la reproduction et l'élargissement du savoir. Pour l'essentiel, c'est de ce point de vue que le droit occidental entendait « œuvre de l'esprit ». Une telle conception n'a que peu de rapport avec le divertissement. On serait pourtant bien en peine de dessiner une ligne de démarcation entre les deux.
Depuis l'origine, le droit d'auteur s'est appliqué indistinctement aux travaux de recherche, et aux œuvres de divertissement. Le rapport entre recherche et divertissement est pourtant ambigu car les deux termes apparaissent comme des extrêmes : l'amont et l'aval de la production. L'antinomie est encore renforcée dans une société qui met au-dessus de tout la production.
La recherche est en quelque sorte la source, la condition, le préalable à toute production, à tout travail ― là où s'élaborent leur pourquoi et leur comment ―, et le divertissement, par essence improductif, ne peut en être que la consommation, la dépense stérile.
À supposer que le divertissement ne soit pas la finalité ultime de la production, elle en est au moins la dépense improductive. N'est-il pas curieux que deux principes si diamétralement opposés se retrouvent réunis, et, tout particulièrement, voient leur union bénie par la loi ? Quel étrange rapport peuvent-ils entretenir, au point qu'il ne soit pas si facile de les distinguer, ni sans doute souhaitable ?
L'anglais entertainment est moins négatif que le très pascalien français « divertissement ». Dans entertainment, on entend presque entering, training, maintaining. Compris ainsi, le divertissement désignerait plutôt un entraînement, un exercice, un entretien pour l'esprit.
Se divertir reviendrait en somme se maintenir en forme en s'amusant, s'entraîner, s'instruire ; et l'instruction serait alors justement le trait-d'union manquant avec la recherche. Naturellement, on peut aussi chercher en s'amusant.
Ce que la recherche et le divertissement ont en commun est alors identifiable : les deux sortes d'activité n'ont pas de finalité bien définie à l'avance. Quand on cherche, on n'est pas sûr de ce qu'on va trouver, ni comment, ni même si l'on trouvera quelque chose. En fait, nous ne pouvons jamais être sûrs qu'en nous divertissant, nous ne ferons pas des découvertes précieuses, ni qu'en cherchant nous aboutirons à autre chose que garder noter esprit en éveil.
Il n'y a dans les deux cas aucun objectif de fixé. Pour autant, on ne pourrait pas les réduire à des activités vaines ou à des dépenses stériles.
On pourrait aussi bien rêver de soumettre toute recherche à des objectifs de production, et même ― pourquoi pas ? ― ramener toute la production à celle de divertissements. On pourrait diviser la vie en deux parts : d'un côté des activités nécessaires à la production des moyens de divertissement, et de l'autre des activités de loisir pour se divertir de cette production. On pourrait alors sans doute compter sur la religion pour entretenir l'espoir d'une autre vie, à l'évidence après la mort.
À ce stade, le travail deviendrait à son tour un divertissement, au sens pascalien du terme. Il deviendrait bien davantage la condition à laquelle on devrait d'abord se soumettre pour ne pas être exclu du divertissement, qu'il ne demeurerait la nécessaire production de ses moyens. Il finirait par ne plus répondre qu'à un besoin d'insertion, où s'oublierait toute nécessité productive.
Se divertir, littéralement « sortir de la voie » : pour un sévère janséniste, cela ne peut signifier que « s'égarer ». On pourrait le comprendre autrement : sortir du sentier battu, changer son point de vue, cultiver l'étonnement philosophique, rafraîchir ses capacités de concevoir et de percevoir.
Sans doute est-ce ce un peu ce qu'on cherche en lisant une partition, en affichant du code source, en recherchant des croquis préparatoires à une image ou une architecture. Ceci pourrait peut-être éclairer cette notion décidément bien datée d'œuvre de l'esprit. Nous pourrions plutôt dire, en termes plus contemporains : travail de la pensée.
Nous cherchons à retrouver son parcours, à refaire son travail, car la pensée est essentiellement ce mouvement, ce déplacement, et certainement pas une chose.
De là, on pourrait peut-être aussi actualiser et élucider l'autre notion de support matériel. Ce serait la chose, l'objet sur lequel on pourrait écrire d'abord, puis lire, déchiffrer, le travail de la pensée, son mouvement, son cheminement.
Ce serait le livre de papier, le disque compact, la toile couverte d'une croûte colorée… oui, et aussi des impulsions électriques, des vibrations de l'air, des flux de lumière, des champs électromagnétiques… Peut-on contester que de telles choses soient matérielles ? Ou bien seraient-elles des mouvements immédiatement lisibles de la pensée ?
Pourquoi un auteur devrait-il être rémunéré ? Il y a un préalable à cette question : pourquoi le support matériel devrait-il être payé ? La réponse à la seconde question est évidente : parce qu'il a un coût que quelqu'un doit bien prendre en charge. Et la réponse à la première dépend entièrement de celle-ci.
L'auteur est rémunéré dans la mesure où son travail est incorporé à ce support. Naturellement, on n'achète ce support que pour acquérir le travail de l'auteur.
Il n'a jamais été question de négocier une « œuvre de l'esprit » (un travail de la pensée) indépendamment du support dans lequel elle était incorporée, papier, spectacle vivant, connexion, etc. Il n'a jamais été davantage question de payer une « œuvre de l'esprit » en fonction du temps qu'elle a rendu nécessaire, de son prix de revient, de sa valeur intellectuelle ou artistique, ou d'une quelconque valeur intrinsèque, autonome de celle du support. L'œuvre de l'esprit n'a proprement pas de prix. Elle n'en a pas d'autre que celui qu'elle obtient une fois incorporée à un support.
Naturellement, une telle distinction est, si j'ose dire, une vue de l'esprit.
L'Histoire, chacun le sait, commence avec l'écriture. Mais où commence exactement celle-ci ? Si, comme je l'ai déjà dit, elle n'est originellement que l'enregistrement mnémonique entre un acte et sa réitération, toute trace écrite suppose au moins deux dates. Les plus anciennes paroles du Bouddha ont été prononcées deux siècles au moins avant leur plus vieille trace écrite. Elles devaient donc bien être inscrites, au moins dans des mémoires humaines, pendant ce temps.
Si, comme je l'ai dit aussi, le plein usage de la lecture ― c'est-à-dire la navigation dans le texte et donc dans la pensée ―, n'apparaît que bien longtemps après l'invention du signe écrit, alors l'écriture n'apparaît pas en une seule étape, mais au moins en trois moments distincts. Elle commence à apparaître avec la seule mémorisation de paroles longuement ressassées, et elle s'achève avec le plein usage du signe écrit.
Le plein usage du signe écrit, cela revient à circuler dans la pensée. Que ce soit un texte, une partition, des opérations mathématiques, ou encore un plan, une carte, une table, un schéma, le signe écrit nous permet de circuler dans le déroulement de la pensée, d'y naviguer et d'en remonter le cours.
On n'acquiert le support que pour retrouver le travail de la pensée : c'est là la principale différence entre un droit d'auteur et un brevet d'invention. Les deux définissent les droits de propriété sur un travail intellectuel. La différence tient à la valeur intrinsèque du support : le droit d'auteur protège un travail dont l'objet matériel n'est que le média qui permet d'y accéder, et ne nous intéresse pas pour lui-même. C'est l'inverse pour le brevet. Le travail intellectuel nécessaire à la production de l'objet n'intéresse plus vraiment l'utilisateur, mais seulement l'usage qu'il peut faire du produit.
Dans le premier cas, l'usage de l'objet consiste à permettre de retrouver le mouvement de la pensée ; dans le second, l'usage de l'objet ne nécessite pas de refaire le parcours qui l'a fait naître.
Retrouver sur un objet le cheminement d'une pensée, cela pourrait être une définition du verbe « lire ». Pour que la lecture soit possible, comme dirait La Palisse, l'objet (la chose) doit être lisible.
La notion d'œuvre de l'esprit est toute imprégnée de la philosophie des Lumières. Une nouvelle philosophie, une nouvelle science, une nouvelle technique, nées au dix-neuvième siècle, la rendent caduque.
L'antique rapport entre le royaume de l'esprit et le monde de la matière à été bouleversé par une découverte si évidente et si simple qu'on s'étonne qu'elle ait été si tardive : celle du signe et du langage.
Le tournant s'est fait entre les travaux de Boole, de Peirce et de Champollion. Il a bouleversé le rapport entre « les lois de la nature » et « les lois de la pensée ». Il a éventé son mystère, et Dieu en a été ipso facto expulsé de la philosophie et de la science. À partir de ce moment-là, et seulement, on utilisera des arguments scientifiques pour accréditer ou contester la religion, mais on n'utilisera plus d'arguments religieux pour contester ou accréditer la science.
Le concept de lisibilité et de transparence s'éclairent mutuellement. La transparence s'applique explicitement à la lisibilité d'un langage.
Le concept de transparence est relatif : il suppose l'idée de couche, et il réconcilie alors celles de surface et de profondeur.
Considérons la surface d'un écran d'ordinateur. Elle n'est pas transparente comme le verre d'un bocal, et cela ne nous intéresserait pas. Ce qui nous intéresse, c'est la transparence de ce qu'il affiche. Si nous traversons cette première couche, nous trouvons du code, un langage assez facilement déchiffrable par un esprit averti. Ce n'est qu'une nouvelle couche que nous pouvons encore traverser.
Que finissons-nous par trouver si nous nous enfonçons couche après couche ? D'un côté nous avons un dispositif mécanique qui met en action des règles logiques, beaucoup plus ingénieux mais guère différent dans son principe de l'antique boulier. De l'autre côté, nous avons de la pensée traduite en suites binaires.
Cette dernière couche ne nous intéresse pas beaucoup, si ce n'est qu'elle est la dernière interface avec un fonctionnement mécanique.
Le cheminement de la pensée n'est en rien la suite des nombres binaires. Il n'y est nullement lisible pour un esprit humain. Alors, à quoi sert-il de plonger sous la surface de plus haut niveau ?
C'est qu'en réalité il n'y a pas de couche ultime dans un sens comme dans l'autre. Ce qui est affiché à l'écran peut être exporté dans un autre format, imprimé ; une musique peut être jouée, un texte prononcé, et d'une façon générale tous peuvent être édités (ce qui reviendra à modifier la suite de chiffres binaires).
Est-ce là un tournant uniquement propre au numérique ? Certainement non : lire une partition, ou seulement entendre une musique, a toujours pu être suffisant pour permettre de l'exécuter à nouveau, voire la fredonner ; un texte a pu être recopié, prononcé, traduit, paraphrasé, etc.
C'est alors que se pose la question : est-ce encore la même œuvre ? Cette question a un intérêt considérable, pour peu qu'on ne la limite pas au vain problème de la propriété et de la rémunération. En quoi la photographie d'une œuvre du Duchamp est-elle encore une œuvre de Duchamp ? En quoi une traduction d'un livre de Flaubert est-il encore un livre de Flaubert ? En quoi l'exécution d'une symphonie de Beethoven est-elle encore une symphonie de Beethoven ?
Se demander si Ainsi parlait Zarathoustra est bien le même livre que So spracht Zarathoustra, n'est certainement pas comme se demander si une montre est une authentique Cartier. La question est linguistique et sémiologique : celle de la réitération et de la différence.
L'usage d'une « œuvre de l'esprit » est toujours, d'une manière ou d'une autre, sa réitération : le parcours du mouvement de la pensée. La question peut alors se poser : est-ce bien le même parcours ?
En lisant, par exemple Ainsi parlait Zarathoustra, est-ce que je fais le même cheminement que l'auteur ? Posée ainsi, la question est stupide. Ma propre lecture ne sera jamais celle de l'auteur, ni d'un autre lecteur. Il s'agit d'une expérience privée, et l'œuvre de l'esprit ne l'est pas. L'œuvre de l'esprit n'est qu'un parcours balisé. Il suffit donc de circuler entre ses bornes.
Comprenons bien alors que « parcourir » suppose une liberté de navigation, un cheminement de la pensée autonome de l'ordre qui est donné, et non l'abandon passif à un déroulement linéaire.
Si l'on commence à comprendre ce qui précède, ne serait-ce qu'intuitivement, on peut en déduire que l'invention du numérique serait un quatrième moment dans l'invention de l'écriture, et qu'elle n'était donc toujours pas achevée.
Nous avons un quatrième moment, après (i) celui du ressassement en mémoire, (ii) de l'inscription de caractères, et (iii) du plein usage de la lecture, qui est (iv) la conversion universelle en chaînes de nombres. À ce moment-là, toute œuvre de l'esprit, tout travail de la pensée, devient proprement de l'écriture.
Cette écriture se trouve quelque part entre une couche indéchiffrable de nombres binaires, et celle d'une interface intuitive.
Que signifie cette imprécision : quelque part entre deux couches extrêmes ? Elle n'est que générale. Il appartient à l'auteur de préciser pour chaque œuvre. Il peut le faire explicitement. Il le fera implicitement de toute façon.
Il n'y a que des données numériques qui puissent être reproduites à l'identique. Toute autre forme de reproduction ou de réitération subira toujours au moins d'infimes variations. Ces différences pourront être insignifiantes ou significatives.
* Le mot « néant » peut être prononcé en une ou deux syllabes. En règle générale, la différence sera insignifiante ; pas dans un sonnet.
* « Par un point pris hors d'une droite on ne peut mener qu'une parallèle à cette droite. » Les rapports entre les termes de cette phrase ne seront pas significativement modifiés dans une traduction en une autre languie naturelle. Ce n'est pas la même chose avec « Ta Kathy t'a quitté », où l'on ne conservera pas à la fois le sens et les allitérations.
* Dans la plupart des cas, le choix de la police n'a pas d'incidence sur un texte ; pas si c'est un poème spatialiste tapuscrit de Ilse et Pierre Garnier.
* La différence entre une toile de Magrite et sa photographie est négligeable ; pas avec la peinture de Van Gogh.
Pour du texte, de l'image ou du son, une plus ou moins grande finesse dans la reproduction peut être indispensable ou négligeable. La « haute fidélité » devenue un mot-d'ordre cache ici un caractère essentiel de l'œuvre de l'esprit : sa réitération implique un certain seuil d'exactitude. En deçà, la quantité d'information est insuffisante ; au-delà, elle est inutile.
Le créateur numérique peut aujourd'hui définir cette exactitude, entre un trop et un pas assez. Il peut savoir à partir de quel moment des informations supplémentaires n'apportent plus rien à son œuvre, et à partir duquel un manque la dénature. Quand bien même ne le saurait-il pas, ce seuil est implicite.
Il y a là quelque chose qui change notablement la nature de ce qu'on appellera « le travail de l'esprit ». Pourtant, on serait tenté de dire à la façon de Mallarmé, qu'il se change « en lui-même ». Cette fixation entre un rien de moins et un rien de trop a toujours été constitutive du travail de l'esprit : si un tel seuil n'était pas au moins approximativement discernable, l'œuvre ne serait plus à proprement parler interprétable, ni réitérable.
Le numérique met en évidence un caractère essentiel du travail de la pensée. Alors qu'il a besoin d'inscrire les signes qu'il met en œuvre dans, et à l'aide des propriétés mécaniques de matériaux, il en demeure essentiellement autonome. Naturellement, l'informatique n'est que le produit de recherches sur de telles propriétés du langage et de la pensée, qui ont commencé un bon siècle avant l'invention de l'ordinateur.
Ce caractère, l'informatique le met en évidence d'une façon ambigüe, comme une métaphore : l'œuvre de l'esprit est autonome envers son support matériel comme les données numériques envers les disques, cartes ou bandes qui les contiennent. Or, ce sont ces rapports qui sont en question, et le « comme » masque bien plus les explications qu'il ne les donne. Ce serait aller un peu vite qu'en déduire que l'œuvre de l'esprit et les données numériques soient une même chose. En aucune manière ni aucune acception, les octets, les bits ou les logons ne sont des mesures de l'esprit.
Le droit d'auteur et les notions d'œuvre de l'esprit et de propriété intellectuelle qui lui sont consubstantielles, ont d'abord été conçues pour le texte. Le texte, ce peut être l'écriture en langues naturelles, ou en langages mathématiques, ou la notation musicale. De tels textes sont par nature libres et transparents. Toute personne peut apprendre à les lire et à les écrire. Toute personne peut donc copier, modifier, éditer, s'inspirer, plagier, pasticher, critiquer, citer, etc, tout ce qu'elle est capable de lire dans de tels langages.
Le droit d'auteur intervient pour définir les usages légitimes parmi ces possibilités. Il n'intervient pas pour les limiter. Si de telles possibilités sont rendues inaccessibles, le droit d'auteur n'a tout simplement plus lieu d'être.
Par sa nature même, il est possible de cacher un texte, mais pas de l'offrir à la lecture sans ces possibilités de le copier, s'en inspirer, etc. Un texte est lisible (transparent), ou il n'en est pas un.
Un texte peut bien être numérisé dans un langage opaque et propriétaire. Dans ce cas, soit on pourra quand même le lire, et il offrira toutes les possibilités dont la loi définit l'usage, soit on ne le pourra pas, et aucune loi n'aura alors matière à s'appliquer. Si le texte auquel on accède est numérisé dans un langage libre et transparent, on aura plus de confort pour le copier, le coller, l'exporter, le traduire, le citer, etc, mais le cas contraire ne sera pas suffisant pour l'interdire.
Le droit d'auteur s'est étendu à d'autres formes de travaux intellectuels au fur et à mesure que des techniques leur offraient des possibilités semblables. Aujourd'hui, on cherche à l'étendre à des produits qui n'offrent plus les mêmes possibilités, et pour lesquels, naturellement, il n'est pas conçu.
Les législateurs n'y parviendront pas sans en finir d'abord avec le droit d'auteur existant, issu de la philosophie des lumières. Ils n'y parviendront pas davantage en en faisant un autre, inspiré d'une nouvelle philosophie du langage. Ils ne chercheront d'ailleurs pas à y parvenir, d'abord parce qu'ils n'en seraient pas capables, ensuite parce qu'une philosophie du langage ne leur permettrait certainement pas de protéger des ouvrages qui ne soient pas en source libre. On ne pourrait en effet pas se référer à une « propriété intellectuelle » si ce travail « intellectuel » n'est pas lisible dans un langage transparent.
On ne pourra donc fonder une nouvelle législation que sur l'arbitraire ; en termes plus moderne : sur un rapport de force.
L'informatique met en relief un autre caractère de l'œuvre de l'esprit : elle n'est pas une chose, elle est un mouvement, un travail, un procès, et, par conséquence, son usage en est un autre.
Ce n'est pas un caractère nouveau. Par exemple, le droit d'auteur n'a jamais défini dans quelles conditions une musique devait être entendue. Il a seulement déterminé sous quelle condition elle pouvait être exécutée, adaptée, etc. C'est-à-dire dans quelles conditions un travail intellectuel donne lieu à un autre.
Dit autrement, l'accès à un travail intellectuel et l'usage qu'on peut en faire, ne peuvent amener qu'à la production d'un nouveau. Sinon, autant appliquer à toute chose le statut d'œuvre de l'esprit. On ne trouvera pas d'objet manufacturé qui ne soit pas le fruit d'un travail intellectuel, et difficilement un objet naturel.
L'informatique met en relief un troisième caractère : l'œuvre est à la fois personnelle et collaborative.
L'œuvre est personnelle, non seulement parce qu'on ne peut comprendre des notions telles qu'« esprit », « intellect » ou « pensée » sans celle de « personne », mais surtout parce qu'on ne saurait quel contenu donner à cette dernière sans les précédentes.
Elle est en même temps collaborative, puisque son usage suppose un nouveau procès. De fait, le succès d'une œuvre de l'esprit, n'est pas comme on le croit parfois trop vite, son éventuel succès public et la précaire célébrité qui en résulte, c'est l'influence décisive qu'elle exerce sur des œuvres futures.
Le numérique ― en ce qu'il suppose la lisibilité du code source entre l'interface intuitive et les suites binaires ―, l'ordinateur personnel (PC) ― en ce qu'il est justement personnel et personnalisable ―, l'internet ― en ce qu'il est un moyen de communication en réseau, et non pas privée ou de masse ―, sont les trois outils complémentaires conçus à la fois par et pour le travail de l'esprit, personnel et collaboratif.
L'usage de réseaux d'ordinateurs personnels pour la production, la diffusion et la consommation de masse n'est pas impossible, mais suppose un véritable détournement de celui pour et par lequel ils sont conçus, et il en subira inévitablement les limitations.
Aucune loi ne peut aller contre cela, sauf à chercher à limiter ces moyens eux-mêmes, et, de là, ce par quoi et pour quoi ils existent : l'usage du langage et de la pensée. De fait certaines lois aujourd'hui semblent déjà grotesquement le fruit de cette limitation.
Des copies, plus ou moins licites et plus ou moins privées, ne menacent en rien la consommation de masse, tout au contraire. Elles contribuent à la célébrité et poussent tôt ou tard à acheter. Sans ces pratiques qu'elles appellent « piratage », les industries de masse se porteraient à l'évidence plus mal encore. La technologie digitale n'apporte rien de bien nouveaux à la reproduction analogique des magnétophones, photocopieuses et magnétoscopes, ni de plus commode.
Ce que les techniques digitales ouvertes (donc transparentes, donc lisibles) apportent de neuf est tout le contraire de la communication et de la consommation de masse, ce sont des moyens de création, une autre forme d'organisation de la vie intellectuelle, et, naturellement, d'autres pratiques et d'autres contenus.
© 2006, Jean-Pierre Depétris
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