Jean-Pierre Depétris


LA TABLE
D'ORANTE






La Hache
La Tour
La Tache
L’Arc







LA HACHE

I

île à la limite du sens
Sens issue de fuite d’heures
Et tant ira de l’innocent
Que nous dira la fin des heurts

II

Comme vaisseau de l’or du sang
La voile ici donnera l’heur
L’orée à l’aurore gréant
Noble hache taira terre heure

III

Un font la plume et la hache
De deux puis trois vont aiguisant
Oursin fendu de zède en hache
Par douze l’horizon hérissant

IV

De l’aurore à l’occidant
Maçon bûcheron sicaire
Levain oxydera levant
Notre or n’est pas l’or du vulgaire

V

Cis trois ciels trois terres trois eaux
L’un chiffre puis de feu est sel
Apprendra langage d’oiseau
A jeunes gens et demoiselles

VI

Et tant data mettras en cartes
Comme ordonnateur brassant grammes
Ordre donné qu’onque ne parte
Si effet cause du programme

VII

Creuse anse de nacelle
Cargo convoyant sang et or
D’oxyde et gène la vaisselle
Bouche d’azur au rouge port

VIII

Sens direction d’abord sera
Puis sentir fera cette errance
Intelligence enfin viendra
Chemin faisant retour à sens

IX

Sentier où borne la contrée
Contre très contre terminal
Terme détermine citée
Muraille où porte fait oral

X

Donateur par chaleur première
Colore soir matin et veille
Attente ira de socle en terre
Et plus nuit nommeront éveil

XI

Ne connaîtront bâton ni colle
Dit Gomme Rouge ou Soleil Noir
Quand tombe résine en école
Butineront miel du savoir

XII

Et pères des nombres communs
Quand consolation nul n’ignore
Le sel du sol solide et un
Où solidaire seul implore.

XIII

Hérissé d’épines sonores
Flèches hérisson grisonnant
En bordure de mer encore
Marque bornes sur le cadran

XIV

Bourgeonne comme chapelet
Griffonne cendres et tisons
Grains de sable ou orge ou blé
Glyphes sur chape nous taisons

XV

Gerbe monte dans l’œuf de verre
Mythe du signe imitation
Œil ou source très grand mystère
Du signe au singe une inversion

XVI

Air par delà chambres obscures
Chambre cachée ou chambre à air
Feu chemine dans chambre pure
Caméra noire de lumière

XVII

Esquintant les formes parfaites
Cognant le lit aux quatre bords
Faisant coins de palais en fête
Bête ne rentre pas au port

XVIII

Comme pièce en pile prend eau
Pièce qui ni pile ni face
Va et vient de un à zéro
Telle pièce qui tache efface

XIX

Chaland paré de haute noce
Chaloupe pirogue gréée
Blanche voile chalant véloce
En coque de métal soudé

XX

Table gardée scinde secret
Où chymie fait ordre en balance
Tel des schèmes sur le papier
D’algèbre chemine inférence

XXI

Scelle et soude en pétrolier
Huile de pierre noire et grasse
Par clarinette vent soufflé
Sel et soude ensemble brasse

XXII

Amande âprement amère
Taira ou terrera l’appel
Amante roulée par la mer
Terre abîmera navel

XXIII

Ai dormi aussi sous l’étoile
Si veille de toile étendue
Dormi avais rêvé sans voile
Et voile avais éveil rendu

XXIV

Veille rêve au réveil sera
Entre dit ferme passager
Quand lampe sourde sonneras
Ai passé passeras léger

XXV

Êtr’ici êtr’autre toi tu
Que te donnes ailleurs pas encore
Je tue il en autre ici tu
Êtr’ailleur n’être-pas implore

XXVI

Cerne marque pages du pas
Discerne dans le pas qui hausse
Fusil il fut et ne fut pas
Car vision en viseur rehausses

XXVII

Croix cruelle fixe le creux
Cru si fiction croire ou croître
Dénie fission creuset au feu
Plus sacrifie ou moins consacre

XXVIII

Magne empire de Magnésie
Flotte marine inanimée
Et sans amour d’orante Asie
D’animal a souffle mimé.

XXIX

Et forçant tour où pot taraude
De terre en orbe ayant fait gemme
Potier agent que toupie rode
D’autre que L’autre aura fait Même

XXX

Tissant ouvrier autant qu’orfèvre
En bague chatons enchâssais
Livres finis par fines lèvres
Chas étroit par où fil tissais

XXXI

Hissant de marches en degrés
Ou chassant les marchands du temple
Grande sottise au saint n’agrée
Que singes aux marches contemplent

XXXII

Palais oral qu’oriente bouche
Ornement syllabe qu’on sonne
Quand au chant comme en lit se couche
Espace temps que nul ne donne

XXXIII

Temple ou palais ou roi ou pape
Sont printemps où les roses fanent
Quand de dits vains farce et attrape
Font fanatiques et profanes

XXXIV

Bague à orbe est semblable
Où sphère s’incruste en joyau
Un singulier que gèbre encable
Trame du temps onde et noyau

XXXV

Si tonnerre le coeur étonne
Fait ton aussi couleur en pluie
Vitre ou toile tendue où sonne
Reflet raisonne jour et nuit

XXXVI

Joyau singulier un à elle
Monade sur la courbe fend
Du songe au singe une voyelle
Un dit cerne mais ne défend

XXXVII

Dit interdit trament ensemble
Comme cordage cercles vicieux
Rythme et durée matière semblent
Plus que parfait présent est vieux

XXXVIII

Joyau en palais tient la langue
Plus mou qu’elle et que l’os plus dur
Comme le havre où barque tangue
Apparence à parole est pure

XXXIX

Si ombres et lumière tremblent
Ensemble font apparition
Car parfait à passé ressemble
Et apparaître y fait action

XL

Telle épure épouse le trait
Barre nommant et dénommant
Que barrer fait nom pour fermer
Et fractions pôles pour aimants




LA TOUR

I



Plus sable coule et heures passent
Tremblant arrêt et marche lasse
Plus bête vient et plante dents


Torve pâtre revient et cherche
La tour de guet d’où nul ne prêche
Quand sonne l’heure et vient le temps


Tels fruit d’été le chant cruel
Qui enfin frappe leur oreille
Sont tous là quand sort du secret
Alors entendent le décret



II




Taisant secret qui passera
Quand saurez ce que nul saura
Printemps viendra en fleurs premières


Et qui soleil à lune rousse
Fera carré quand herbe pousse
Sera ronde pleine et entière


Et fait couleur de sang vermeil
Comme abeille sur fleur fait miel
Ciel en sol ainsi est posé
Rose brûle sel par rosée



III




Marchands souffleurs disent et passent
Ne jamais marchandises lassent
Fétiche roi guidant l’errance


Petits crabes dans le panier
Semblent se battre pour gagner
Est-ce là à vie donner sens


Prince jongleur telle est vision
Qui sème en petits sillons
Qui dira que la vie est dure
Sûrs sont les sens et la censure



IV




Mendiants tout de bure vêtus
Qui poursuivent la voie têtus
Ne dénient le chemin progrès


Comment chemin ou progression
D’induire traduit tradition
On si marche ignore degrés


Toujours fidèle suit la voie
A moins qu’assis n’attende foi
Comme chien la voix de son maître
Après mort attendant renaître



V




Cimier tenant lieu d’aiguillon
A déesse aux yeux de scorpion
Athénas était sœur jumelle


Car chymie et sagesse mènent
Le monde clos de ka en ème
Comme savants mesure appellent


Faisant de l’or l’original
Et d’occident le terminal
Pallas Sekmet ensemble avancent
Brandissant comme dard la lance



VI




De croix fais moyeu à la roue
Et perle as jetée dans la boue
Pour inscrire marque au trépas


Quand avancer devient pénible
Car presque arrivé à la cible
Mais trop loin pour forcer le pas


Très beau trépan alors entaille
De ciel et terre les entrailles
Jamais de vie nul ne se lasse
Est-ce toi ou chemin qui passe



VII




Quand serpents calmes et lézards
Sur pierre encore chaude du soir
Attendent rêves de la nuit


Et qu’ombre engourdissant les veines
Crépite en visions souveraines
Comme au fond du corps enfouie


De promesses que ciel ne tient
Qui saura se faire gardien
Si la lumière se fait ombre
Ce n’est pas comme bateau sombre



VIII




Le sourire sec du reptile
Faisant masque à la vie fragile
Te montre ce que ne veux voir


Que toi plus proche de la mort
Car sang froid irrigue le corps
Et âme ne sait concevoir


Ainsi bête prend la cité
Par face imposant le respect
Mais par queue trahissant le deuil
Comme en terre tombe la feuille



IX




Bête de l’homme est faite maître
Singeant savoir qu’il croit connaître
Devant elle il s’incline bas


Chien cherchant mouton pour berger
Ne sait plus quel troupeau garder
Et de son ombre emboîte pas


Ombres il dit grandeurs divines
Quand soleil vers le sol décline
Ou quand sur désert fait mirage
Il dit que singe est un grand sage



X




Mots tus mots dits des deux encore
Que maudit interdit d’éclore
Si fortune n’est qu’ornement


Silence tu est plus sonore
Que le malheur que mots déplorent
Si dire n’est plus qu’argument


Langue fourchue n’est pas que double
Deux lettres de simple à souple
Si prétexte n’est qu’entre dit
En texte contexte est mal dit



XI




Ne prétend donner de leçon
Appareil qui sème les sons
Pareil à qui sonne les sèmes


Ne sommes sommés de nous taire
Même raisonneur solitaire
Avons droit de nouer des lèmes


Et si le corps ne se transforme
Après donner la vie à forme
Principe ou être en cet instant
Ne manque de marquer le temps



XII




La main le geste et puis la voix
Qui te traînent dans cette voie
T’affranchissent du temps qui passe


Car ni l’ordre ni la durée
Qu’on te demande d’adorer
Ne sont la clef de cette passe


N’oublies le rythme ni le vent
Ce temps que tu perdras souvent
Et que tu souhaites retrouver
Ne saurait être une durée



XIII




Sainte coupe sur un coussin
Sa croupe son cou et ses seins
Pourquoi faut-il qu’y pense encore


Et qui veulent ainsi prier
Tête posée sur l’oreiller
Doux comme l’air et cousu d’or


Iraient encore à la fontaine
Et quand la coupe serait pleine
Et vidée la chair du rosaire
Rêveraient d’abreuver les terres



XIV




Dame demandera au roi
D’accorder la vertu au droit
Tendra pour lui plaire sa main


Mais ne la blessera pour roses
Qu’épine couvre avant qu’éclosent
Ni aujourd’hui ni pour demain


Par excès de discernement
Pour séparer jaune du blanc
Voudrais mettre des deux côtés
Polissage et cruauté



XV




Moins de cinq que de quatre proches
Immobiles comme des roches
Et se tendent vers le couchant


L’entendras tu comme un appel
Si les étoiles sont des stèles
Comme les termes dans un champ


Le premier cri de la mouette
Saura ainsi pour le poète
Mieux qu’abscisses et ordonnées
Le temps et l’espace donner



XVI




Désert de glace ou bien de sable
Détiendra à jamais la table
Dont le plateau est bien gardé


Alors reviens aussi souvent
Ou sur la mer quand siffle vent
A la pierre si bien bordée


Sécheresse glace ou écume
Ou chambre sous le toit qui fume
Font claire voie dans le secret
Au tableau noir lors du décret



XVII




Les signes noirs sur le papier
Sont comme notes au clavier
Sans ombres ne seraient lumières


Et de la sueur de ton front
Commande aux mains ce que feront
L’eau de la roche n’est pas claire


Le bois quand la corde se tend
Ou quand l’arbre ploie sous le vent
Est-ce le souffle ou bien le son
Qui sème graines tel poinçons



XVIII




Poissons qui craignent les nageurs
Se réfugient près des pêcheurs
Tandis que vas vers le désert


Devras mourir pour exister
Et fait qu’inspire est excepter
Si le feu doit épouser l’air


Sur route encore chaude du soir
Les hérissons et les lézards
Tel croira le chemin tracé
S’endorment se font écraser



XIX




Et si têtards donnent grenouilles
Combien seront sur tant qui grouillent
Quelle pomme sera pommier


Conclura par compétition
L’idiot qui nie consolation
D’unique se voudra premier


Ici même dé du destin
Ecris de ce pays lointain
Où vient fleur rouge au champ de blé
Où la hache sèche a tremblé



XX




Ajouter à mourir un ère
Car deux fois seront nécessaires
Et ne craindras isolement


Si le feu doit épouser l’air
Et si l’eau pénétrer la terre
Et que ce soit insolement


Ce qu’Horus est résolution
d’Osiris est dissolution
Le bas le haut qui firent paire
L’horizon que ses fils tuèrent





LA TACHE

I

Compas que pointe fait pivot
Tendre mouton revient et chante
Arcs traçant par monts et par vaux
La tour de guet que nul ne hante

II

Papillon sur les fleurs se valent
Char a mimé couleur des bois
Que de lourdes chenilles chalent
Et teint acier quand feu aboie

III

Arc déterre et cisal fait paire
Que pareille à soleil levant
Délayant lueurs éphémères
D’énigme colle relevant

IV

Comment dire que vaut le vent
Qu’astre attardé siffle au sillage
Telle tige ploieras souvent
Si concilie sage et sauvage

V

La gèbre a l’agent aboli
Jabarat ignore pénombre
Car avant de lier délies
Chiffres ne retournent au nombre

VI

Si lecture la lettre cache
Comme écorce au tronc fait tablier
Lit carré que le courant trace
Relire inverses en relier

VII

A lèvres libres de boussole
Que dent ni serre ne détend
Aucun multiple ne console
Parferas en un seul pourtant

VIII

Emir hériteras du trône
Qui porte monde et plumier
Ministre à qui ciels font couronnes
Prends dépôt de un à premier

IX

Terre que docte ouvrier décrypte
Et sait secret qui fait savoir
Comme encre coule dans la crypte
Et mène lessive au lavoir

X

Quand lessive travail de femme
Sépare la poudre du grain
Et de lavoir noir de calame
D’entre rives affûteras drain

XI

Eclair à tonnerre contexte
Orage étonnera mots dits
Si de glissement fais conteste
Malédiction n’est que mal dit

XII

Orque fermera bouche à port
Et orbe boucle de dentelle
Sortir issus par contre fort
Pose à porte fermée le scel

XIII

Trace par levier tel sillon
Si tant font que lauriers ne clament
Et marteau sonne carillon
D’éclairs à lumière fais lames

XIV

Chevalier à tour est allé
Fais tour que le sort enmasque
Cheval ennoblirait valet
De lumière copie est masque

XV

Sixte planète par étain
Fais flèches à quinte essence
Ou couleurs sur voile déteins
De saint à sexe fais licence

XVI

Si tard au visage affiché
Vision que train porte là-bas
Sis au ras du col attachés
Vise à la tache chargée bas

XVII

Quand sa rosée portera l’ombre
N’émeuvent ondes frissonnées
Où seront déposés les nombres
En rétine sont retournés

XVIII

Tiens en ta paume ferme amant
Qu’étoile aimante glaive aigu
Pomme d’amour tiens fermement
A firmament cieux fixes mus

XIX

Métal revient de l’autre bord
Au-delà en-deça pour faire
Ici-haut de la mine or-
Ifice descendant en fer

XX

Métaux virant de vigne en vin
Etable où bestiaux font manège
Et qu’interrogent les devins
Vinaigre et grain que l’huile allège

XXI

D’écumes et de sel voilage
Ailerons sillant la main lisse
De reflet se faisant sillage
Blanc lavoir où voiles pâlissent

XXII

Ici-haut de mine aurifère
Pour au-delà en-deça faire
Orifice descend en or
Et métal vient de l’autre bord
De ô en ère
XXIII

Putréfaction d’œil la paupière
De paille à poutre est poussière
Hache fait tache devient poudre
Ascension ne sert à résoudre
Si devient pierre


XXIV

Tendre mouton revient et bêle
Dans tour de guet d’où nul n’appelle
Compas que pointe fait pivot
Arcs traçant par monts et par vaux
Que mouton hèle


XXV

Eteint le froid qui fend ma joue
Et ploie les membres dans la boue
Pliant et traçant branches cassent
Enfer tiré par temps qui lasse
De bout en bout



XXVI

En galerie fredonne l’air
Comme pousse rame en galère
Enfant tirant le wagonnet
Où travailleur est travaillé
Chante misère


XXVII

Comme image devient magie
Fut-il sans elle monde agi
Imagine ce que serait
Mais sans elle ne le pourrais
Pas de magie


XXVIII

Par quarte ou quinte nous disons
Tissus où défilant tison
Dégueuleront treize ors certains
Ici au rouge du matin
Est-ce raison



XXIX

Miroir que découpe diamant
Et secrète discernement
Où réflexion cherche discret
Comme roulent dès du cornet
Fidèlement


XXX

Quand table dira la balance
Où tombera ira la chance
Et autre comme fermement
Dispensera ressentiment
Sans différence


XXXI

Si Auteur n’est que nom pour l’Autre
Qu’épître nommera apôtre
Et signe donnera Seigneur
Si Autre fait nom pour Auteur
L’autre de l’Autre



XXXII

Car tomber sous le sens veut dire
Quand témoin ne ferait qu’en rire
Ou que tombe en oreille son
Comme graines donnent moisson
Où mai fleurir

XXXIII

Et si fleur tombe sous les yeux
Comme pluie tomberait des cieux
Ou pleurs ruissellent sur la joue
Fleur toujours se nourrit de boue

XXXIV

Est-ce fleur qui tombe des cieux
Ou ciel qui monterait du feu
Ou mer que mondifie le sel
Au soir où résonne l’appel

XXXV

Sel mortifie dans la pâleur
Ce mai qui sonne la couleur
Rien mieux que sel ne le console
Ni souffre jaune ne désole
XXXVI

Or si couleur semble colère
Tant sève monte vers l’éther
Et pourtant sur les branches ploient
Fruits si murs quand la plante croît

XXXVII

Ne plus tenir colère ici
Si couleur vêt de blancs habits
Quand dirai le chant du calvaire
Dame sera vêtue de vert

XXXVIII

Si de rouge est repos le vert
Tels s’oxydent cuivres et fers
Lune évidant des évidences
De verre lune est transparence

XXXIX

Plus transparent que n’est le verre
Lune sera portée en terre
L’une à autres n’est pareille
L’unique qu’astres ensommeillent

XL

Argent que corrode le souffre
Autres astres à l’orient s’engouffrent
Où Lune se constellera
Quand astre autres donnera





L'ARC


I

Croissant que fidèle n’encroit
Et dure et ferme ne crédit
Si ferme que sans cesse croît
Plus provoque que ne prédit

II

Telle roue que moyeux rebiffent
Et collines ou mer ou champs
Murs et toits au-delà des ifs
Rend étrange depuis couchant

III

Plus que branche sur la fenêtre
Ne changerait lune au ciel noir
Orbites que tu sais connaître
Davantage changent le soir

IV

Fera plan de terre inclinée
Combien plus troublant qu’inconnu
Tel que voile ciel animé
Ce que vêt de regard est nu

V

Croyance n’est rien à connaître
Ni doute ombre du savoir
Virent image et signe en voir
Conjugues avec être naître

VI

Si s’ouvre mer en ton esprit
Vois d’abord et ne t’y refuse
Et ne conjure ni ne prie
Ni ne soupçonne aucune ruse

VII

Où termes bornent l’horizon
Non ta vue qu’ici bornerait
Mais car découpe trois maisons
Où quatre heures multiplieraient

VIII

Croyance et doute ne sont rien
A savoir et ce vu est signe
Où voir image et signe est sien
Savant sauveur il se désigne

IX

Maisons logis gîtes stations
Horizon hérissé d’étoiles
Hautes tours et dominations
Tel est mis en palais le voile

X

De douze arcs a le cerf chassé
Ortygia la vierge féconde
Pivotent orbes enchâssées
Le ciel fixe et la terre ronde

XI

Orion dans la mer se baigne
Par cinq étoiles en carré
Hors des flots où sa tête saigne
Une aiguille marque l’arrêt

XII

Entre Sagittaire et Scorpion
Lignes qui croisent la Polaire
Marquent les pans de sa prison
Entre Scorpion et Sagittaire

XIII

Comme oursin hérissé d’épines
Est-ce sang qui saigne ou qui signe
La flèche perçant la rétine
Dans le bain où il se désigne

XIV

Est-ce flèche ou est-ce aiguillon
Est-ce raison est-ce science
Est-ce trait mortel ou poison
Ou le fléau de la balance

XV

Ainsi Horus a dépecé
Tel père horizon trop lointain
Tant que syllabes prononcées
Font nombre à griffes du destin

XVI

L’os du poisson est dit arrête
Et chair faible a le souffle ardent
Non qu’au pécher elle se prête
Et tombe tendre entre ses dents

XVII

Mais souffle la pénètre et la taille
Mieux que pierre sous le burin
La soulève comme une paille
Ou la coule comme l’airain

XVIII

Ce que vêt de regard est nu
Et doute ombre du savoir
Si tel est singe devenu
Que signe revient à devoir
Seigneur est nu


XIX

Alors regard dira regret
Et être naître ou n’être pas
Quand le vin ni le vent n’agrée
Et que mains ne répondent pas
Dira regret


XX

Et la branche sur la fenêtre
Plus que collines fleurs ou champs
Rend étranges depuis couchant
Les lunes que tu sais connaître



XXI

Issu ne se fera con’être
Et tableront par la fenêtre
En n’autre langue ne sachant
Où le sel te fera séchant



XXII

Sans nul doute je dis Ça voir
Et rêve aux femmes du lavoir
Si près avant même que n’être
Qui dit renier ne dit renaître

XXIII

Savant savon dans l’eau qui coule
Au linge dont ligne découle
Savon qui glisse l’inférent
Choses vraies que dit révérend

XXIV

Infère et révère de même
Les seuils qui vont jusqu’au seizième
Ou défère en quatre et en deux
Le cube lisse et savonneux

XXV

Si ciel est plus ferme que terre
Pourquoi fenêtre ajourerais
Quand l’horizon se découdrait
Et que dira le N’Autre Pair

XXVI

Est une île sol de l’absent
Quand tue et voue tant de présents
Que jeu n’est plus que mettre en joue
Et trois personnes se dévouent

XXVII

Mais de trois il n’en est que deux
N’autre paire se fera d’eux
A moins que l’Un ne tue son frère
Tels pour qui la louve fut mère

XXVIII

Et s’il n’est pas d’autre que Lui
Comment Lui serait-il un autre
Tel que l’astre dans le ciel luit
Faut-il donc l’appeler le N’Autre

XXIX

Comme le feu au ciel ni Lui
Ni Toi qui protège des pluies
Ni Moi qui découpe l’année
Mais On dans le ciel ordonné

XXX

Si la marque de je est ène
Est-ce vouer à l’autre haine
A moins que jeu ne soit d’enfant
Qui sait si lame ou l’âme fend

XXXI

Dis-tu qui sait ou bien qui est-ce
Répondra celui qui acquiesce
Et sera sous les yeux présent
Dans la main même de l’absent

XXXII

Ne peux dire l’oiseau voleur
Est-ce que l’aile ne transite
Pas plus vouloir ne fait couleur
Ni courir au-delà du site

XXXIII

De révérend la référence
Fléau que porte la balance
Si réelle que soit la chose
L’arrêt ici n’est pas la pose

XXXIV

Mais révérence et référent
Ne feraient le tour du cadran
Et ne renonce à quadrature
Qui forme voile en la mâture

XXXV

Et nature ici ne fait n’être
Ni n’être pas quand pas pénètre
Terre céleste et azur nu
Où Sol céleste est retenu

XXXVI

Est-il l’ornement ou le temple
Ce corps vrai d’où tu la contemple
Et de sacrifié et sacré
Tu tires abstrait et concret

XXXVII

Mental menteur que tu redoutes
Et toujours soustraits et ajoutes
Métal montreur de l’au-delà
N’est que monstre qui batela

XXXVIII

Non tu n’aimes marchands du temple
Fût-ce à ce corps d’où tu contemples
Qui sait quand te réveilleras
Quand sur les os tu marcheras

XXXIX

Quand tu vois des cailloux dans l’eau
Et qu’ils te semblent des joyaux
Deviennent ternes sans beauté
Dès que sur terre ils sont portés

XL

Ainsi à l’orée du sommeil
Entre la Lune et le Soleil
Tu voudrais garder dans la main
Le rêve encore frais du matin





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© 2002, Jean-Pierre Depétris

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