Jean-Pierre Depétris
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->[SEPT]
dans le silence du vent le bruit sec de la vague les genêts du talus la feuille de journal accrochée dans les branches que tombe le soleil que tombe le silence quand tout s'agite si fort sous le vent dans le silence bruissant mais le bruit arrêté retenu dépassé par son mouvement même qu'étouffe l'excès d'air dans le silence du vent l'éclat des pare-brise plaquant le son l'emportant les couleurs éteintes de bleu la chaleur du soleil qui tue le jaune de la terre dans le silence..
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la mer dont on ne peut croire le fond, la mer surface, et dont la profondeur est comme signe au sens, même quand on y plonge, la mer qui fait niveau, donne une densité compacte à l'horizon, même quand on y plonge, ouvre les yeux sous l'eau, qui fait surface, comme signes aux sens, sur les poissons serrés, dont la poussée proportionnelle à la masse du corps ferait douter du fond, qui s'impose à l'esprit pourtant, mais qu'on ne croit réel, dont la poussée retient à la surface, et devient plus puissante encore lorsque forçant les bras, lorsque les reins se tendent, la vitre et la buée, le voile et le regard, qui fait signe du sens, comme on souffle du verre, à l'horizon du corps, vêtu de peau mais au pied de la lettre, que tourne la vision comme au tour du potier, quand la surface est là et qu'elle vient donner sens aux organes, la terre sur son axe qui oriente le jour, sous la pluie des jardins, le ruisseau des pavés, la surface du jour, vêtu de peau, mais au pied de la lettre, quand le feuillage s'ouvre sur les nuages dressés, les ruelles serrées, les escaliers de pierre, quand les îles affleurent de la mer, comme le signe au sens, et que la profondeur se ferait irréelle, alors même qu'elle s'impose à l'esprit, et que la certitude est là, te vêt mieux qu'une peau, mais ne pouvant y croire, comme le fond de l'eau d'où la poussée te chasse, incrédule et certain, le corps percé exactement à la place des sens, quand certitude et croyance s'opposent, comme un verre renvoie le jour, mais voudrait le garder, s'unir, ne faire qu'un, comme face au sourire de la murène, attaquant comme un chien, sous la surface dont on ne croit le fond, mais s'impose à l'esprit, comme la dent, les roches, le souvenir de l'ours blanc quand la mer fait banquise, comme signes aux sens, qu'on ne sait de quel rêve se teinte le savoir, les voiles sur la mer et les nuages dressés qui attirent les feuilles, l'écume blanche, qui pourtant fait surface, comme vitre au regard, comme règle au calcul, comme l'os de la sèche, la mousse des rochers, la vase des ruisseaux, le bec du jour dans le voile des sens, quand le roc se teinte de rose et d'or, le chant des poulaillers, les biscuits sur la toile cirée, quand la murène est invisible entre les pierres, le rire du lézard tremblant, quand les sens percent le voile, à l'heure du regard, quand les langues se parlent, le besoin de manger, les mures du chemin, les lapins, les perdreaux, la sole sur le sable, les figuiers des ruelles, le besoin de manger comme celui de dire, quand la langue se fait filet, fait viseur au regard, le chien furieux du haut de sa murette, le regard fou de la murène, pour que le sens se creuse comme l'air sous le son, vagues de la surface sous les nuages dressés, et la soif des jardins, les sauterelles grises, la joie de l'hameçon, le fruit des épineux, si le roc blesse le corps mouillé de sel, ou que pique l'oursin, les méduses, la vive, la coquille coupante des moules, si la vague est trop forte pour prendre pied au roc, et que soudain, comme claque un fusil, se referme la main, croire et savoir font les mâchoires d'une pince où le corps se raidit, comme le jour entier passant par une vitre, le sang avide d'air sous les côtes qui battent, que l'on sait comme on sent, et n'est plus incrédule au vide de la mer, que l'esprit se fait muscle sur l'os, ou corde qui tend l'arc, sous le ciel, ou que tendent les drisses, la mer si plate sous le ciel, ou les cimes si hautes, lorsque le fond saisit, l'aveuglante lumière, le vent si haut, la mer immense où affleurent les îles, le roc si dur, ou que pique l'oursin, falaise où volent des corneilles, dans l'aurore du jour, la lumière aveuglante que la pluie a lavée, quand le tissus s'agite, le pas dans le pays, les yeux percés de jour, quoique la lumière diffracte, ou que monte le doute quand tombe sous le sens, à moins que ne saisisse la crainte, mâchoires d'une pince sous les muscles serrés, ou soleil en aplomb, la lumière qui tombe sans reflet, le jour plein qui efface la vitre, rend le signe réel, ou direct, tombant dans la couleur, paraît craquer comme l'os sous la dent, l'immédiate clarté sous le verre poli quand la lumière tombe,
et les branches s'agitent sur la voiture rouge, la vitre du café, le mur de pierre ou les branches remuent, les bouteilles rangées, le reflet sur les vitres, quand hurle la radio et que moteurs vrombissent, le clocher de l'église découpant les collines, et les nuages cachant le soleil, sous les mâchoires de la pince, ou la pointe de l'arc, quand la pluie a rincé les couleurs et les volets repeints, l'odeur de la pinède, lavée aussi, le bruit de la radio que porte mieux l'humidité de l'air, quand l'après-midi se fait calme, malgré le bruit de la radio, le mugissement des moteurs, en attendant la nuit où les mouettes crieront dans le ciel rouge, et les lumières scintilleront moins qu'après les jours de vent, et les feuilles caressent le balcon, et la moto penchée devant le mur de pierres, l'ombre du caniveau, et sachant que les lumières scintilleront moins que les nuits de grand vent, quand les feuilles remuent, lavées de pluie, les bouteilles rangées dans le bar qui s'agite, sur une langue que nul ne comprend, les airs idiots qui font danser les gestes, quand les bateaux sont immobiles au long de la jetée, et que les mouettes crieront la nuit sur la ville, sur le ciel rouge derrière les volets, que frissonnent les feuilles, caressent le balcon, les vitres des fenêtres croisées, les pigeons sur le fil, en ligne, regardant l'horizon où passe un pétrolier, à l'heure où la poste se ferme, le bruit de la radio dans le bar qui s'agite, la lumière tombant, comme la certitude sous le sens, mais ne pouvant y croire, comme la vitre diffracte le jour, au point qu'on voudrait la serrer, la main fermée sur une pince, mais ne pouvant y croire, comme si, se fermant, les yeux pouvaient clore la nuit, dans le jour, la lumière que la pluie a lavé, les vitres des fenêtres, sur les feuilles serrées qui bougent dans le vent, en haut du mur de pierres, et la moto penchée, près du pilonne droit, quand les nuages se serrent, le clocher de l'église découpant les collines, les genêts du talus, le bruit de la radio, ne sachant plus comment couvrir le silence sans le peupler de sens, sillonnant le silence, comme une étrave ouvre la mer aux oursins silencieux contre les roches, aux dents serrées sous les épines noires, à l'ombre des grands nuages, qui fraîchissent les rues que le vent a lavées, si sûr que ne pouvant y croire, jusqu'à ce que la main ne saisisse l'image comme se ferme l'œil, qui pourtant reste ouvert si le doigt seul se tend, le doigt et l'œil n'étant plus qu'un, quand il ne s'agit plus de douter ni de croire, quand la chair du poisson est percée, comme par le regard, le doigts, ou le harpon tendu, quand descend vers le fond, le corps percé et immobile, dans les reflets d'argent, l'éclat sauvage du métal, que la lumière devient sang dans les veines, ou rouille du métal, car la gorge ne diffracte pas l'air, quand le doigt se referme à la place de l'œil, que la main se clôt sur la nuit, ne pouvant plus douter, scellant la nuit au fond du corps, l'enfermant sous la peau, quand le signe se fait harpon,
figuiers tremblants des ruelles qui montent, le souffle de la mer, plate comme le jour, courbe du mur aveugle, les barreaux des lucarnes, le bruit absent, l'oubli dans chaque pas, le sens qui se dérobe, quand toute chose peut en valoir une autre, se charge, creuse, à se faire manteau, ou voile transparent, filet plutôt, se jette pour saisir, ou se jette comme on jette un mégot, se fait valeur, seulement si perdue, jetée au loin, pour l'autre, pour la proie ou pour l'ombre, quand le temps se dérobe, pour affermir le pas, ne sait que dire l'heure, ou le heurt du battant, quand la main se met à trembler pour trop suivre la langue, tremble comme la mer, aveugle, aveugle sous les yeux, les rides du bassins, quand le vent bat la toile,
comme le jour entier passant par une vitre, cherchant la proie pour retrouver l'état, le sang avide d'air sous les côtes qui battent, et que rebat le flot, cherchant l'état qui doit trouver la proie, où l'on sait comme on sent, et n'est plus incrédule au vide de la mer, sous le ciel, la mer si plate, dont on oublie le fond, le vent si haut, quand le pouce fait de la main mâchoire d'une pince, fait pouvoir de croire et de savoir, que l'esprit se fait muscle sur l'os, ou corde qui se tend, et ne pouvant douter,
à moins que ne cherchant le signe ultime, la membrane du ciel, l'écran de la raison, l'un dans l'enchaînement, l'autre dans le regard, ne voyant pas le jour tomber, devant, toujours devant, où la vision se trace, de l'état, de la proie, ne sachant plus lequel serait moyen de l'autre, le vide du moyeu qui fait tourner la roue, oubliant la lumière qui tombe, la pluie lavant les toits, la lavande en bouquets, le rouge de la terre, le métal d'autre bord, et avide au regard, la bâche dans le vent, le murmure des feuilles, quand l'aube se teinte de rose, et que l'or se glisse au vide des falaises, les pneus noirs crissant, et les yeux de la femme feraient signe ultime au réel, la voix ou le regard, quand tombe la lumière, la flaque du trottoir où le reflet du ciel fait soupçon de la vie, comme tombe le ciel dans les flaques du jour, le regard de la femme que l'on voit signe ultime, où s'enfonce le jour, se servant de la voix quand l'air se fait lumière et vient rougir le sang, la rouille du métal, ou le rouge des toits que la pluie a lavés, le battement des gouttes, la fraîcheur sur la peau, le beurre des tartines et l'odeur du café, quand tourne le soleil, et la terre penchée, chaussé de pneus lourds, le bus crissant dans le virage, les barreaux des lucarnes, courbe du mur aveugle qu'estompent les ors du matin, quand la femme vient faire signe ultime au réel, cherchant dans le regard l'enchaînement des choses, la vérité du jour, sachant que le premier maillon est d'abord le prochain, et tombant en avant dans le tranché du signe, sachant le fond et ne pouvant y croire car toujours tombe et remonte le jour, à l'aube des étraves, les pins noirs tendus à contre jour sur la colline, l'aube des hautes grues, quand l'aurore dessine son ébauche trop pâle, le regard de la murène, qui guette entre les pierres, les mâchoires comme une main tendue, sans pensées, sans savoir, sans main pourtant, ni griffe ni pensées, le piano de la chair, les écailles dorées dont la chair paraît fondre en fumées de lumières, comme les feuilles poussant serrées, agités et tendus, que lave le soleil, où la chair paraît fondre, comme une toile battant sous l'eau, ou lorsque le vent éteint les couleurs de la terre, répand sa cendre bleue, semée d'or, et d'argent, sur les genêts qui sèchent, ou lorsque le barrage aspire la lumière dans son lent tourbillon, mêlant le bleu du ciel au jaune de la terre, mais peuplé d'or toujours, et d'argent, les poissons tachetés, quand le fond se fait sens et que la pression monte, qui fait le signe dur, quoique vibrant, vivant, tendu comme une flèche, soupçonnant que le signe et le sens se rejoignent, vers le fond où la lumière plonge, mais faisant corps, et chassé vers le haut, quand le jour se fait nuit et se peuple d'étoiles, que la mouette vole en criant sur les toits,
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